vendredi 24 mai 2013

Gatsby le Magnifique de F. Scott Fitzgerald



Gatsby le Magnifique
F. Scott Fitzgerald

Quatrième de couverture
Au début des années 1920, dans une débauche de luxe, d’alcool et d’argent, un mystérieux personnage s’installe à Long Island dans un domaine incroyable d’extravagance. Qui est ce charmant et légendaire Gatsby, incarnation du pouvoir et de la réussite, dont les fêtes attirent toute la société locale ? Les rumeurs les plus folles circulent. Un espion ? Un gentleman anglais ? Un héros de guerre ? Un mythomane ?
Une vérité plus profonde se cache derrière l’orgueil et la magnificence de Gatsby, celle d’un ancien adolescent pauvre et d’un amant trahi qui ressemble beaucoup à Fitzgerald lui-même.
Le vingtième siècle ne fait que commencer mais la fête semble déjà finie…








Ma rencontre avec le livre

C’est, comme pour ma chronique précédente, à un cours d’anglais que je dois la découverte de ce livre. Notre prof nous avait demandé de traduire les dernières pages du roman (belle manière de spoiler ce livre !). Mais, cela remonte à cinq ou six ans et j’avoue que je ne m’en rappelais pas vraiment. Ce n’est en effet qu’avec la sortie du film de Baz Luhrmann que j’ai décidé de lire le livre en entier (je dirai d’ailleurs un mot sur le film en fin d’article).

Ma lecture du livre

Gatsby fait partie de ces romans qui, tout en racontant une histoire convenue (une romance impossible), laissent pourtant sur leur lecteur une impression singulière et durable. Différents éléments contribuent à ce sentiment positif que m’a laissé le roman.
  
Tout d’abord, le contexte des années 1920 à New-York m’a beaucoup plu. En apparence belle et clinquante de dynamisme, cette époque des fêtes et du Jazz (cf. les « Années folles » en France pour cet état d’esprit) ne m’est pas forcément très connue et c’est donc avec plaisir que je m’y suis plongé au gré des péripéties de Gatsby.
  
Cependant, Gatsby ne se veut pas un roman historique. Et on touche là au deuxième point fort du livre : la subjectivité du narrateur et son ton, sa voix particulière. En effet, Gatsby ne propose pas un tableau objectif de ce New-York des 1920’s. Notre découverte se fait par le biais d’une narration à la première personne sur le mode du souvenir. Nick Carraway (le narrateur) écrit ce dont il se souvient de ces années là. Ainsi, le livre que nous tenons entre les mains n’est en quelque sorte pas celui de Fitzgerald mais celui du narrateur lui-même qui explique dès le début son besoin de coucher cette histoire sur le papier. Dès lors, c’est moins le récit événementiel ou les éléments historiques qui comptent que la perception et les émotions que tente de retrouver le narrateur en écrivant. Il adopte alors une voix bien particulière qui dégage un je ne sais quoi entre la nostalgie et la désillusion. Ce contraste entre le récit d’un monde léger, insouciant, débridé et ce ton désillusionné, cette tentative de recul vis à vis des événements (que le narrateur ne semble pas réussir à mener à son terme) font la force de cette histoire.
  
Et on en arrive alors à la troisième qualité de Gatsby : la peinture d’un rêve américain qui se fissure. Au-delà de la romance, si le roman a connu un tel succès après la vie de son auteur, c’est grâce à son caractère visionnaire et à la capacité de Fitzgerald de pressentir, derrière les paillettes, l’alcool et les fêtes, les fissures qui commencent à apparaître dans cette belle Amérique rêvée. Une phrase de la quatrième de couverture exprime très bien cela : « Le vingtième siècle ne fait que commencer mais la fête semble déjà finie… ».

 Ainsi, si l’intrigue est assez standard, le roman est très riche. De plus, l’auteur sait ménager son suspens autour du personnage de Gatsby. Le mystère est savamment entretenu par des allusions et des tournures de phrases du narrateur visant à intriguer le lecteur. Les personnages sont complexes et leurs portraits bien brossés. Gatsby est donc un roman réellement plaisant à lire et dans lequel on entre sans problème.


Et le film ?
Je suis globalement très satisfait par le travail d’adaptation qui a été fait. Le film est ainsi très fidèle, à l’exception de certaines modifications concernant le narrateur. Le texte du roman est littéralement présent dans le film. Le casting colle aux personnages même si j’avoue avoir eu parfois un peu de mal avec Tobey Maguire.
On peut être surpris par la surenchère d’effets spéciaux et la bande son (qui est un des gros plus du film, en particulier la piste Youngand Beautiful de Lena Del Rey). Certains crieront à l'anachronisme. C'est qu'ils n'ont pas compris la teneur du film et l'objectif visé par le réalisateur : Gatsby n'est pas un roman/film historique. On est dans la subjectivité du narrateur qui  rapporte son histoire sur le mode du souvenir et non en direct, souvenirs qui émergent de soirées alcoolisées. Dès lors, le but est moins de reconstituer fidèlement des évènements que de retrouver une atmosphère à travers des souvenirs par définition déformés, exagérés. La surenchère visuelle et sonore trouve alors son sens : de la même manière qu'on se rappelle notre premier sapin de noël bien plus grand, brillant et magique qu'il ne l'était sans doute, le narrateur ne nous donne pas à voir Gatsby et son monde tels qu'ils étaient réellement, mais comme il s'en souvient et se les est reconstruits.
Les effets spéciaux dégoulinants sont ainsi volontaires pour restituer ces étoiles dans les yeux que gardent en mémoire le narrateur. Les anachronismes musicaux sont quant à eux un moyen de faire ressentir avec un langage compréhensible pour le spectateur de 2013 la fièvre de ces soirées (si on nous avait mis de la musique d'époque, certes on aurait été dans le "vrai" mais il y aurait eu un décalage entre le ressenti du narrateur et celui du spectateur. Or, je le redis, c'est là dessus que tout repose et pas sur le contenu ou la peinture historique des soirées proprement dits.
La seule faute de goût dans la direction artistique est selon moi le recours à des plans 3D qui n’apportent rien (j’ai vu le film en 2D et, lors de certaines scènes, on voit clairement que les plans ont été pensés de manière à mettre en évidence, sans apport de sens, la 3D).
Bref, une adaptation honnête mais qui ne parvient cependant pas à restituer totalement le ton et les émotions du narrateur que véhiculent le roman. La faute peut-être à un éclairage mis plutôt sur la romance dans le film.


  
Pour résumer : un roman culte qui n’a pas volé sa place. Une histoire d’amour convenue mais un style fort et un ressenti général bien singulier qui révèle le regard visionnaire de Fitzgerald sur la crise du rêve et de la société américaine à venir.

8,5/10

2 commentaires:

  1. Comme toujours, je me délecte de tes billets ! Tu as vraiment ce... "talent" (c'est pas le bon mot mais je trouve pas de terme adéquat) qui est de réussir à insuffler l'envie de lire chez les autres. Ma réticence concernant l'histoire extrêmement convenue est toujours là mais j'ai pris note de tous tes (bons) arguments et j'espère en sortir avec, moi aussi, "une impression singulière et durable" ;).

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  2. Merci :)
    (bon, en y réfléchissant, le qualificatif de durable est peut-être un peu anticipé puisque seul le temps me dira si effectivement c'est le cas !)

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