Wastburg
Cédric Ferrand
Folio SF – 404 pages
Quatrième de couverture
Wastburg, une cité acculée entre deux royaumes, comme un
bout de bidoche solidement coincé entre deux chicots douteux. Une gloire fanée
qui attend un retour de printemps qui ne viendra jamais. Dans ses rues
crapoteuses, les membres de la Garde battent le pavé. Simple gardoche en train
de coincer la bulle, prévôt faisant la tournée des grands ducs à l’œil ou bien
échevin embourbé dans les politicailleries, la loi leur colle aux doigts comme
une confiture tenace. La Garde finit toujours par mettre le groin dans tous les
coups foireux de la cité. Et justement, quelqu'un à Wastburg est en train de
tricoter un joli tracassin taillé sur mesure. Et toute la ville attend en se
demandant au nez de qui ça va péter.
Avant même de voir qu’il était proposé sur le forum
Livraddict, j’avais déjà eu quelques échos plutôt positifs de ce livre
atypique. Je n’ai donc pas hésité très longtemps avant de postuler pour le
lire. Merci à la team Livraddict de m’avoir sélectionné car il s’agit d’une
belle découverte !
Ma lecture du livre
Si avec Wastburg vous espérez trouver de la bonne
vieille fantasy à la Tolkien avec ses nains, elfes et magiciens, passez votre
chemin. Ou plutôt non, osez le saut dans cette fantasy d’un autre genre,
rafraîchissante et osée loin des clichés éculés du genre ! La citation de
China Miéville placée en exergue du roman donne d’emblée le ton en qualifiant
Tolkien de « kyste sur le cul de la littérature fantasy ». Prêts à
tenter l’expérience ?
Qu’est-ce donc, alors, que ce Wastburg ? Cédric
Ferrand, l’auteur, rompt avec les conventions du genre en ne proposant ni une
histoire de magie ni une quête initiatique dans laquelle le lecteur suivrait un
jeune héros au destin exceptionnel accompagné de nains ou d’elfes. Ici, à
chaque chapitre, on change de personnage, personnages qui ne sont finalement
que des prétextes à l’immense fresque donnant à voir la ville
« médiévale » de Wastburg. Du garde au scribe en passant par le gamin
des rues, ces figures donnent à voir la vie de la cité dans ce qu’elle a de
plus prosaïque et vulgaire mais aussi dans sa complexité. Ainsi, on peut donc
dire que la véritable héroïne de l’histoire c’est la ville elle-même qui prend
forme et vie au fil des pages.
Cédric Ferrand prend donc le partie d’une forme et d’une
histoire originales. Mais cela fonctionne-t-il ? A mon sens, oui. Je dirai
même que j’ai été conquis par la recette. Je ne mentirai pas : j’ai eu un
peu de mal au début à entrer dans le livre. En effet, en apparence (du moins
pendant les quelques 50 premières pages), rien ne relie les chapitres et les
personnages entre eux. Puis, petit à petit, quelque chose émerge et une
histoire de la ville se met en place. Celle-ci, si elle n’est pas en elle-même
révolutionnaire, est bien ficelée et agréable à suivre. Premier succès, donc,
en ce qui concerne le projet de raconter l’histoire d’une ville.
Succès également pour la galerie de personnage que dresse l’auteur.
Je l’ai dit, les personnages sont relativement variés. Si certains m’ont plus
accroché que d’autres, je dois reconnaître que leur traitement est toujours
très bon. En quelques pages l’auteur parvient à donner un véritable background
à ses personnages, aussi bien une histoire personnelle qu’une psychologie
propre. On sent ici le talent de rôliste de l’auteur qui, si il en est là à son
premier roman, était déjà connu dans le monde des jeux de rôle. Ainsi, c’est
parfois avec regret que l’on quitte un personnage lorsque son chapitre se
termine, preuve que malgré la brièveté du temps passé avec chacun d’eux
l’auteur parvient à nous accrocher. Quelques bémols cependant au sujet de ce
procédé de la galerie. Tout d’abord, c’est avec regret que je constate que
l’auteur ne s’est intéressé qu’à des personnages masculins. Les femmes
n’apparaissent que comme protagonistes secondaires dans des chapitres toujours
focalisés sur un personnage masculin. Or, je suis sûr que l’auteur aurait pu
trouver des représentantes de la gente féminine permettant de donner leur
touche particulière à l’atmosphère de la ville qu’il dépeint. Deuxième
critique : la faiblesse des descriptions. Autant la psychologie et le
background des personnages étaient de qualité, autant j’ai parfois eu du mal à
me faire une image physique de certains des personnages.
Mais, devant ces succès, on pardonne ces quelques
faiblesses, d’autant plus que le tout est servi dans un style vivant, avec un
vocabulaire fleuri qui contribue pleinement à l’atmosphère de la ville. A
travers tous ces éléments (intrigue, personnages, plume), Cédric Ferrand
réussit son pari : la ville de Wastburg et ses habitants prennent vie
devant le lecteur et se dotent d’une réalité impressionnante grâce au souci du
détail et de l’anecdote dont fait preuve l’auteur. En tant qu’historien j’ai à
plusieurs reprises pu sentir l’influence des recherches historiques sans doute
réalisées par Cédric Ferrand pour parvenir à ce niveau de crédibilité,
reconnaissant ici et là des éléments sur la ville médiévale vus en cours. Bref,
l’auteur a réussi à mettre tous les atouts de son côté pour réussir à faire de
ce roman une réussite.
En résumé : Wastburg est un roman original qui prend à
contre-pied les codes de la fantasy. Les allergiques à ce genre y trouveront
quelque chose qui pourra peut-être les réconcilier tandis que les habitués
pourront y respirer un peu de fraîcheur dans un genre aujourd’hui bien saturé.
Parfaitement maîtrisé, le style particulier de Cédric Ferrand parvient à véritablement
donner vie à sa ville sans pour autant négliger sa galerie de personnages, tous
très soignés. Un auteur et un univers à suivre de près car le seul regret à la
fin du livre, c’est cette impression que tous ces personnages sont autant de
portes vers des histoires qui demandent encore à être écrites.
Et quand on est ni allergique, ni habituée au genre, on peut quand même tenter ? :)
RépondreSupprimerComme toi, j'ai vraiment beaucoup aimé cette plongée dans ce Wastburg des plus mortels pour ces habitants ;)
RépondreSupprimerBien sûr, Nyx ! C'est même vivement conseillé ! Le dépaysement n'en sera que plus grand ;)
RépondreSupprimerDe la Fantasy qui prend à contre-pied les clichés? J'ai bien envie de tenter (même si je sens que je vais râler sur la place des femmes secondaire) L'illustration de couverture m'a tapée dans l'oeil en tout cas, elle est superbe *_*
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